samedi 11 février 2012

Osez être franc, oui mais...

Dire ou ne pas dire ? Comment savoir ?
Je veux dire pour ne pas me mentir mais si je le fais, comment cela sera t'il pris ?

Pour moi, la franchise n'est pas une question de justification, l'important est dans la manière, le quand et le comment... Et puis, est-ce que l'on veut dire pour s'extérioriser ou bien pour échanger ?

Dire quelque chose n'est pas imposé quelque chose. L'autre a le droit de comprendre ou non, de réagir d'une façon prévisible ou non. S'il l'on s'accorde la liberté de ton, il faut accorder à l'autre la liberté de compréhension ou de rejet.

Socrate nous a légué un guide pour trouver un juste milieu. Ce sont 3 passoires à positionner entre notre esprit et nos cordes vocales :
  • La passoire de la Vérité : ce que je vais dire est-il vrai ?
  • La passoire de la Bonté : ce que je vais dire est-il dans l'intérêt de la personne à qui je m'adresse ?
  • La passoire de l'Utilité : ce que je vais dire vaut-il la peine d'être dit ?
J'ajouterais que tout est question de circonstance et de manière... Avant de dire, il faut s'assurer d'un minimum de réceptivité de l'autre. Même les choses les plus importantes doivent être dites plus tard si notre interlocuteur n'est pas en état de nous écouter. Ce point est trop négligé dans la communication écrite, par mail. Les choses importantes doivent être dites à l'oral, pour pouvoir valider la réceptivité au préalable et ensuite pour expliciter si nécessaire et pour recueillir la réaction, car un message important mérite nécessairement une réaction. A minima, une prise en compte... Combien de fois avez-vous envoyez un mail important en vous demandant s'il a été reçu ? lu ? sans parler de la prise en compte du contenu. Plus le message est important, plus le "feed-back" l'est aussi...

Et pour ce qui est de la manière, il suffit de penser à cette situation : un personne vous appelle au téléphone à votre bureau et vous parle en mandarin et vous ne savez que parler français et anglais. Vous entendez mais êtes incapable de comprendre. Vous comprenez que c'est une langue asiatique et c'est tout. Vous signifiez votre présence et votre incompréhension en français puis en anglais. Votre interlocuteur vous reformule alors en anglais sa demande et vous commencez à comprendre ce qu'il veut et qui il est. Petit piège de compréhension pour l'exemple : la personne vous parle en mandarin et vous reconnaissez la langue. Le raccourci que beaucoup feraient serait de croire que c'est un Chinois. Ah bon ? Et vous parlez en anglais, cela fait-il de vous un citoyen Britannique ? Et imaginez maintenant, que vous étiez très occupé, vous ne réponderiez probablement pas au téléphone. En face à face, comment exprimeriez-vous votre refus de communiquer qui est aussi votre droit ?

Cet exemple est très basique mais il illustre des choses essentielles. Qu'il n'y a aucune évidence d'aucune sorte dans la communication. Si votre contact téléphonique avait su, il aurait parlé immédiatement en anglais car son intention est d'être compris. Et s'il savait encore, il vous appellerait à un moment où vous êtes davantage disponible. Et s'il savait, après tout, il ne vous appellerait pas...
Pour être compris, il doit ajuster son message à ce que vous êtes capable de comprendre techniquement. Il doit adapter sur la forme et sur le fond. Cela est valable pour le langage, pour le vocabulaire, pour les intentions mêmes. Pourquoi ne pas le dire en chantant ? Ou bien avec de l'humour ? Oui selon les circonstances, les interlocuteurs... Avez-vous remarqué que vous percevez sans le voir si votre contact vous sourit ?

Au delà de ses aspects techniques et de respect, et pour en revenir à la question de la franchise, la clé est de relativiser les propos de l'autre et les vôtres avec la lecture que nous offre Épictète : "Ce qui trouble les hommes, ce ne sont pas les choses, mais les opinions qu'ils en ont".
En d'autres termes, cela veut dire que nous comprenons d'abord avec nos référentiels de connaissances, d'expériences et de valeurs qui nous sont propres. Et si on s'intéresse véritablement à la portée de notre message alors il faut pénétrer dans le référentiel du destinataire pour comprendre comment il s'approprie ce que l'on vient de dire en toute franchise. Et là, le respect et l'écoute active sont nécessaires... Nous devons faire attention à la personne qui réagit, chercher à comprendre ses émotions, ce à quoi il se réfère, ses intentions, et puis ensuite étudier le sens de sa réponse. Vous avez été franc, il vous faut accepter la réponse, mais surtout ce qu'en retient et ce qu'en fait votre interlocuteur en tant qu'être humain... Ce n'est qu'à ce moment là, voire après plusieurs échanges, que vous comprendrez si votre message a été compris, accepté ou non. C'est ce qui fait la différence entre "communiquer un message" et "passer un message"...

Alors oui à la franchise pour rester soi, être vrai mais vous devez rester attentif à votre interlocuteur en tant qu'être sensible qui est dans son ressenti, dans ses idées voire ses préoccupations.
Une communication a davantage de chance de réussir quand l'émetteur du message fait un gros effort d'adaptation à l'autre. Et s'il fallait retenir une seule raison à cette nécessité d'adaptation : tout simplement parce que l'autre ne vous a généralement rien demandé. Pourquoi ferait-il un effort de "réception" si vous ne faites aucun effort "d'émission" ?
Il y a effort et chance de succès quand il y a prise en compte du facteur humain, des singularités et des droits de chacun, au premier lieu desquels : le respect de la disponibilité et des ressentis, du droit à ne pas comprendre, à être en accord autant qu'en désaccord et même du droit à l'erreur, surtout pour vous même.

Cette maxime tirée d'un conte indien résume assez bien les rôles de chacun dans l'interactivité de la communication : "Je suis responsable de ce que je dis et tu es responsable de ce que tu comprends". Si cette maxime était partagée, ce serait génial. Mais souvenez-vous, il n'y existe aucune évidence d'aucune sorte : vous connaissez cette maxime, vos interlocuteurs la connaissent-ils ? l'appliquent-ils ? A vous de vous en assurer...

Au final, c'est le terme "assertivité" qui résume le mieux droit à la franchise et la manière de le faire : c'est l'affirmation de soi dans le respect d'autrui...

Et puis terminer sur une vidéo édifiante sur la franchise...
Et enfin, je vous recommande un ouvrage de référence sur la communication : "L'art d'être communicant avec les autres et aves soi-même" de Thierry Tournebise.

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